Sud-Ouest : Le train des reproches et la grande vitesse

sudouest.com, Patrick Berthomeau, La chronique du médiateur, le 20 Juin 2009

Le train des reproches et la grande vitesse

Il n’a échappé à aucun de nos lecteurs qu’un des grands chantiers européens à venir concerne notre région : la ligne à grande vitesse (LGV), qui doit relier Paris à Bordeaux et se prolonger vers Toulouse et l’Espagne, bute depuis des années sur des problèmes de financement puisque les collectivités territoriales doivent mettre la main au porte-monnaie. Mais elle bute aussi sur des obstacles écologiques qui vont de la protection de notre proche environnement à une question encore plus fondamentale : est-il nécessaire et raisonnable de développer les transports à grande vitesse, projet conçu en période de croissance continue, alors que l’heure de la décroissance a peut-être sonné ?

Ce n’est pas ici que nous trancherons cet épineux débat. La question pour nous est de savoir si l’information que nous délivrons au jour le jour ou à l’occasion de synthèses comme celle que nous vous avons présentée les 10, 11 et 12 juin dernier dans nos pages consacrées à la région est bien de nature à rendre compte de la complexité des enjeux et de la valeur des arguments développés par les partisans et les opposants au projet.

Ces derniers ne le pensent pas et nous le reprochent parfois avec vigueur. À titre d’exemple (et de résumé), ce courriel qui nous est adressé par Simon Charbonneau, juriste, universitaire et partisan déclaré de la décroissance, assez remonté contre la ligne éditoriale de « Sud Ouest » concernant les projets pharaoniques de LGV. « L’information diffusée sur ce dossier est complètement déséquilibrée dans la mesure où seuls les défenseurs institutionnels d’un projet digne des Trente Glorieuses apparaissent en première page. Aucune information n’est publiée à page équivalente sur l’existence d’une opposition citoyenne à ce projet ruineux pour la collectivité dans le sud du département de la Gironde et en Pays basque. Ce déséquilibre donne l’impression d’une pure et simple opération de propagande en faveur du projet défendu par les grands élus et les Chambres de commerce au nom d’une idéologie obsolète du progrès technique. » De son côté, Philippe Barbedienne, de la Sepanso, nous reproche vertement de minorer la contestation girondine : « Manifestement, pour « Sud Ouest », les LGV intéressent toute la région mais le tracé girondin fait exception, puisque ce qui se passe autour de lui, surtout si ça ne va pas dans le sens de la pensée dominante, ne concerne plus que les pages Sud-Gironde. »

Directeur de l’information de « Sud Ouest », Patrick Venries reconnaît que « l’expression directe des opposants peut paraître limitée dans son volume par rapport aux informations que nous donnons régulièrement sur le projet. Toutefois, fait-il remarquer, jamais l’opposition n’a été ignorée et ses motivations ont été clairement exposées. Dans la série que nous avons proposée la semaine dernière, il en a été question chaque jour. Cependant, il est vrai aussi que le journal s’est effectivement engagé derrière ce projet qui, entre autres effets, propose une alternative intéressante au tout routier. Et n’oublions pas qu’il y a à « Sud Ouest » une tradition de fort intérêt pour les questions d’aménagement et d’équipement. Toutefois, il faut admettre que tous ne présentent pas le même intérêt et je comprends que l’on soit plus circonspect sur un dossier comme celui de l’A 65. »

La polémique instaurée autour de la LGV n’est pas vaine. Au-delà de ses aspects technique et économique, elle pointe des attitudes et des revendications de plus en plus fortes, émanant de citoyens qui ne délivrent plus de blanc-seing aux élus, grands et moins grands. Le bouleversement des moyens d’information aidant, se dessine là un nouveau défi que la presse écrite doit nécessairement affronter.

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