mediapart.fr, Xavier Thibert, le 7 mars 2010
Face aux enjeux de la technoscience : notre démocratie sommée de se métamorphoser
Selon Dominique Bourg, philosophe et directeur de l’Institut des politiques territoriales et de l’environnement humain, la démocratie moderne serait atteinte de cécité : pour retrouver un regard responsable sur le long terme, le système représentatif de nos démocraties est sommé de se métamorphoser. Dans cet objectif, de nouveaux contours institutionnels, de nouvelles pratiques doivent émerger, notamment pour mettre des limites aux manipulations et contrôles technologiques. Avec une nouvelle approche des institutions démocratiques plus participatives et délibératives, Dominique Bourg nous propose de construire une véritable » démocratie écologique « .
Le système représentatif de nos démocraties peut-il aborder le développement à long terme de nos sociétés ?
Aujourd’hui, le système de gouvernement représentatif est trop fixé sur le court terme : nos démocraties sont caractérisées, pour reprendre une expression de Pierre Rosenvallon, par » une myopie vis-à-vis du futur « . Le mot d’ordre de la démocratie moderne est : j’obéis au présent. Nous sommes là pour jouir au présent et le temps démocratique devient une espèce d’éternel présent, sans passé ni futur. Avec ce mot d’ordre, la question du futur est mise aux oubliettes faute de personnes pour la représenter. Du coup, notre système n’est pas en mesure d’apprécier et de répondre aux problèmes environnementaux qui se pose sur le long terme.
Pourquoi cette impuissance ?
Cela tient principalement au fait que c’est le marché qui décide de tout. Nous n’avons aucune prise sur les logiques économiques et sur l’influence qu’elles exercent sur notre vie quotidienne par l’intermédiaire des nouveaux objets produits par les sciences et les techniques. Regardez le problème des OGM, ce n’est pas les citoyens qui ont décidé, c’est un système économique qui a dit : » tu auras ça dans ton assiette et tu le mangeras « .
Pour vous, pas de doute, le principe du gouvernement représentatif est prisonnier de logiques économiques pernicieuses.
Le principe du gouvernement représentatif ne peut plus jouer le rôle qu’il a joué dans le monde classique, au XIXème et dans le première partie du XXème siècle car aujourd’hui l’innovation scientifique et technique obéit à une logique économique qui est la logique de croissance du PIB. On sait très bien maintenant que le développement de la technoscience est complètement déconnecté de la poursuite du bonheur, du bien-être ou de la satisfaction des citoyens. C’est une espèce de machine économique internationale qui nous dépasse et semble nous écraser. Dans certain cas, l’innovation scientifique et technique est bien reçue, pensez aux gens qui se précipitent pour avoir la dernière génération de l’i phone. Sur d’autres aspects, elle peut être très contestée, regardez le débat public sur les nanotechnologies. Je pense que c’est une situation qui va nous échoir pendant longtemps.
Quelles solutions proposez-vous ?
Nous n’avons plus le choix : il faut reprendre en main Lire la suite
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