Dur, dur, d’être écolo

lexpress.fr, Eric Lecluyse, Richard De Vendeuil, le 09 novembre 2009

Dur, dur, d’être écolo

Se soucier de l’état de la planète, c’est bien. Sauf quand le quotidien du citoyen « vert » devient un parcours du combattant. Et vire au stress, voire à la parano.

Depuis quelques semaines, avec la disparition des ampoules à filament de 100 watts et plus, un étrange spectacle se répète au rayon luminaires des grands magasins. Des grappes de clients hagards tentent désespérément de décrypter les étiquettes des lampes basse consommation ou d’accrocher un vendeur qui les sauvera (peut-être) de l’enfer. Certains transpirent même carrément d’angoisse, depuis qu’ils ont vu la vidéo alarmiste postée sur DailyMotion par Annie Lobé, une journaliste indépendante. La dame -dont on n’entend que la voix off- y compare les champs électromagnétiques émis par les ampoules classiques et par les fluo-compactes, très inférieurs. Les fréquences basses « sont des cancérogènes possibles pour l’homme », affirme-t-elle, citant un rapport de l’Agence internationale de recherche sur le cancer. Le tout sans apporter d’autre preuve scientifique que son « gaussmètre », un boîtier mesurant les fameux champs, filmé en gros plan. Panique chez les internautes. Au point que l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie a dû publier un avis pour rassurer le public. Annie Lobé, elle, se défend : « J’apporte des élements scientifiques et j’émets des hypothèses ».

conso verte: des sites utiles

Pour mieux choisir, Mescoursespourlaplanete.com : un guide soutenu par l’Ademe, avec de nombreuses fiches produit, de l’épicerie aux vacances équitables.

Pour repérer ceux qui abusent, Observatoiredelapublicite.fr : les pires marques du greenwashing (ou « écoblanchiment », procédé qui consiste à faire passer pour vert ce qui ne l’est pas) sont épinglées par ce site qui émane de l’Alliance pour la planète (groupement d’associations écologistes).

Pour échanger, Planete-attitude.fr: édité par le WWF-France, ce réseau social est un lieu d’échanges et de débats, de la meilleure façon d’introduire le bio dans les cantines à la préservation du loup…

N’empêche. Réchauffement climatique, famine, désertification, taxe carbone : les nerfs sont à vif. Même les gosses s’y mettent. « Maman, tu aurais dû jeter ce papier dans la poubelle à recycler », lance Grégoire, 6 ans, à sa mère, débordée. Et Nicolas Hulot qui enfonce le clou, avec son documentaire Le Syndrome du Titanic, tour d’horizon affolant de notre amie la Terre martyrisée par l’Homme. Certes, il faut bien donner l’alerte, puisqu’il y a urgence, mais comment empêcher qu’une affreuse angoisse ne submerge ceux qui ont capté le message ? L’autre jour, j’ai lu un article sur la qualité de l’eau potable dans certains coins de Paris, ça m’a fait flipper », confie la jeune actrice Sara Forestier au magazine Elle. Et flipper peut mener loin. « Les piles, ça ne se jette jamais, c’est quand même pas compliqué d’aller dans un centre de tri en un coup de Noctambus ! » hurle Valérie Lemercier dans son dernier spectacle, en écolo givrée tellement préoccupée de l’état de la planète qu’elle harcèle ses voisins jusqu’à pas d’heure pour qu’ils trient leurs déchets.

« A force de voir la vie comme une série de nuisances, une source d’émissions de carbone et de pollutions diverses, on tombe dans l’anxiogène, confirme la géographe Sylvie Brunel, auteure de A qui profite le développement durable ? (Larousse). Hélas, donner mauvaise conscience et demander aux gens de se repentir est au cœur du discours écolo! C’est même le nerf de la guerre. L’empreinte écologique -l’impact des activités humaines sur les écosystèmes- est une façon de nous dire: ‘Combien de bonnes terres gaspillées par votre train de vie!' »

Des labels trompeurs…

Le citoyen « vert » a compris qu’il devait changer de comportement. Oui, mais Lire la suite

L’écologie pourrait modifier « un peu » le mode de vie des Français

sudouest.com, NC, le 10 Octobre 2009

SONDAGE. D’après un sondage, à paraître demain dans Sud Ouest Dimanche, les français sont prêts à modifier « un peu » leur mode de vie, pour faire respirer la planète.

L’écologie pourrait modifier « un peu » le mode de vie des Français

Après le succès de Home, le film de Yann Arthus Bertrand, c’est au tour de Nicolas Hulot de tirer la sonnette d’alarme des méfaits du mode de vie de l’homme sur l’environnement, dans son long-métrage, intitulé : Le syndrome du Titanic.

Le succès de ses diffusions associé à la poussée des verts aux dernières Européennes, ont conduit Sud Ouest Dimanche à s’interroger sur la disposition des Français à changer leur propre mode de vie pour répondre aux exigences écologiques. 599 français de plus de 18 ans, représentatifs de la population ont accepté de répondre au sondage ifop, commandé par le journal, et qui paraîtra demain dans Sud Ouest Dimanche.

Les premiers résultats de l’étude montrent que lorsqu’il s’agit de s’impliquer personnellement et à consommer moins, les Français apparaissent quelque peu réticents. Certes, près d’un quart des Français (27%) se déclare « prêt à changer en profondeur son mode de vie et à restreindre sa consommation de manière significative ». Néanmoins, la majorité des personnes interrogées (53%) n’est prête à consentir que des efforts limités (« modifier un peu son mode de vie et limiter sa consommation »). En outre, 20% des répondants refusent de réduire leur train de vie.

La disposition à modifier son comportement présente des intensités différentes selon les catégories de population. Comme on l’observe traditionnellement sur les questions liées au développement durable, l’âge influe notablement sur les réponses ; les plus âgés Lire la suite

Nicolas Hulot et l’oligarchie, par Hervé Kempf

lemonde.fr, Hervé Kempf, le 3 octobre 2009

Nicolas Hulot et l’oligarchie, par Hervé Kempf

Le film de Nicolas Hulot et Jean-Albert Lièvre, Le Syndrome du Titanic, sur les écrans le 7 octobre, dérangera. Ce documentaire écologiste ne montre presque pas de nature : rompant avec l’esthétique de carte postale habituelle en la matière, il se confronte à la dure réalité de la misère et de l’injustice. Il tente de dire, malaisément, que la dégradation vertigineuse de la biosphère est le résultat d’un ordre social devenu fou, et qui fait porter le poids de ses conséquences sur les faibles, les pauvres, les exploités.

Il répète que la clé de sortie de cette logique destructrice est dans la baisse de la consommation matérielle dans les pays riches. Gageons que ce discours, plus âpre que celui sur les « petits gestes pour la planète », recueillera un accueil mélangé. Et si Nicolas Hulot allait commencer à déranger ?

La force du personnage est de rester populaire en allant à la pointe de ce que la société française – ou plus exactement le système médiatique qui donne accès à celle-ci – accepte d’entendre à un moment donné.

Depuis une dizaine d’années, il a ainsi fortifié et peu à peu durci son discours : alarmant d’abord sur l’ampleur du désastre écologique, il a ensuite cherché à impliquer les citoyens, puis a porté la question sur le terrain politique. Il arrive maintenant à montrer que l’écologie est d’abord un enjeu social, et critique – mais en termes encore très généraux – le « libéralisme ».

Dans le commentaire habillant les images, il dit : « Je suis perdu. » Perdu ? Ah ? Je lui téléphone pour comprendre. Il répond : « Je suis perdu parce que je ne comprends pas qu’il faille autant d’énergie pour placer des évidences auprès de nos élites. Des gens qui ont une intelligence parfois fulgurante ont des angles morts, c’est-à-dire qu’ils n’arrivent pas à comprendre que leur modèle économique ne tiendra pas. »

C’est le problème de Nicolas Hulot, et donc notre problème : il croit que l’action politique est aujourd’hui inspirée par la recherche du bien commun. Mais il oublie la force des intérêts : l’intérêt individuel et l’intérêt de classe. Ce qu’Hulot appelle les élites, c’est aujourd’hui une oligarchie. Elle ne veut pas entendre l’évidence de la crise écologique et de la désagrégation sociale, parce que le but principal de l’oligarchie est de maintenir ses intérêts et ses privilèges. Elle ne s’intéresse au bien commun que pour autant que cela ne remet pas en cause sa position.

Quand on est gentil, il est difficile d’assimiler le fait que les autres ne sont pas tous gentils. Nicolas Hulot est au bord de le faire, et surtout d’en tirer les conséquences. Soit : ne plus parler vaguement du « libéralisme », mais porter le couteau dans la chair des égoïsmes de classe. Il peut le faire. Mais il sait qu’alors, tout soudain, Lire la suite

Nicolas Hulot combat « Le Syndrome du Titanic » au cinéma

aqui.fr, Solène Méric, le 4 septembre 2009

Nicolas Hulot combat « Le Syndrome du Titanic » au cinéma

Nicolas Hulot, était jeudi 3 septembre, à Bordeaux pour présenter en exclusivité son premier long métrage. Co-réalisé en partenariat avec Jean-Albert Lièvre, grand réalisateur de film documentaire, « Le Syndrome du Titanic« , sans point de comparaison possible avec les émissions « Ushaïa Nature », ouvre selon ses auteurs « un champ de débat, de dialogue et de réflexion » sur la réalité de notre monde en crise. Mettant en lumière paradoxes et absurdités de nos sociétés, le film dresse un portrait alarmant de cette humanité aveugle qui continue à danser et à chanter alors que le bateau coule, ou presque…

Soyons clairs, « Le Syndrome du Titanic » n’est pas un film environnemental, pas plus qu’il n’est un long format des émissions auxquelles nous a habitué Nicolas Hulot. « Ce film est d’avantage un appel à la raison et un acte politique qu’un documentaire sur la crise écologique. D’ailleurs, la « belle nature sauvage » est la grande absente… »
Des images chocs

Si le projet, envisagé il y a quatre ans, penché du côté du bilan écologique, le résultat final en est assez éloigné puisqu’il dresse non pas le constat d’une crise écologique, mais de l’ensemble des crises qui touchent la condition humaine. « On a trop l’habitude d’identifier une crise indépendamment d’une autre. Pour s’accommoder de la réalité, on parle d’une crise économique, d’une crise environnementale, d’une crise culturelle… Mais tout est lié, l’homme doit faire face à une seule crise particulièrement complexe et grave, une crise de l’humanité, voire humanitaire. » Et pour démontrer l’idée, lui et Jean-Albert Lièvre, ont baladé leur caméra aux quatre coins du monde, de l’opulence la plus scandaleuse, à la misère, par définition, inacceptable. Et la succession de ces images chocs fonctionne.

Comment ne pas s’interroger quand, à la vision d’un « Bar à oxygène » tokyoïte, où chiens et maîtres s’enferment quelques minutes dans des cylindres « d’air pur », succède l’image difficile de vieillards chinois démunis, dont des cages grillagées sont les seuls abris?

Comment rester impassible devant ces touristes occidentaux photographiant et filmant, contre rémunération, une famille d’une tribu de Namibie ? Quelle réaction avoir lorsque à la vision d’un de ces « malls » américains, temples de la surconsommation, succède les images d’un Nigeria où des petites mains s’échinent à réduire en miette les circuits imprimés, et toxiques, de nos ordinateurs ? Et enfin quelle logique faut-il voir entre les trottoirs bondés de sans-abris d’une grande ville américaine, et la file de clients dormant à même le sol la nuit précédent le lancement du nouvel Iphone ?

« Pas trop tard pour changer »

Par dessus ces images, alternent les commentaires personnels d’un Nicolas Hulot mi-désespéré mi-optimiste, et des extraits de discours ou interviews de grands témoins historiques comme JFK, Oppenheimer, Al Gore, et bien d’autres. Ces regards extérieurs se posent généralement dans une posture optimiste sur l’avenir de l’humanité, et sa capacité à s’en sortir. Mais, à la réflexion, ces témoignages souvent anciens mettent en exergue l’absence d’amélioration, voire l’aggravation de la situation depuis qu’ils ont été prononcés

Même si les commentaires se veulent par moment plus optimistes, soutenant l’idée qu’il n’est « pas encore trop tard pour changer » notre manière d’être, c’est plutôt amer et inquiet que l’on sort de la salle de cinéma. Mais sans doute l’individu doit-il en passer par là, pour passer à l’action, ou du moins réfléchir à ses propres habitudes de vie. A vous de voir, à partir Lire la suite

Hulot à Bordeaux, évacuation du Titanic, taxe carbone, un monde devenu fou…

sudouest.com, Jean-Denis Renard, le 4 Septembre 2009

RENCONTRE. Il était en visite hier à « Sud Ouest » pour le lancement de la promotion du « Syndrome du Titanic ». L’occasion de réagir à la taxe carbone

Nicolas Hulot fait évacuer le « Titanic »

L’ouverture sur le monde commence à Bordeaux. La toute première présentation publique du « Syndrome du Titanic », le film de Nicolas Hulot et Jean-Albert Lièvre, qui sortira le 7 octobre, a eu lieu hier soir à l’UGC Ciné-Cité de la ville. Elle s’est tenue en présence des deux réalisateurs, qui ont d’abord été accueillis dans les locaux de « Sud Ouest » par Patrick Venries, le directeur de l’information, et Yves Harté, son adjoint. L’homme de télévision s’y est prêté au rituel de la conférence de presse, suivie d’un chat avec les internautes sur sudouest.com. Morceaux choisis.

Quatre ans de croisière

« On a commencé à parler de ce film il y a quatre ans. Depuis lors, le contexte a changé, le film est plus contemporain que mon livre éponyme, que je voulais adapter. Au final, je ne considère pas qu’il s’agit d’un film environnemental ou écologique. Il évoque plutôt la combinaison des crises, celle du modèle dans lequel nous vivons.

« Je dis au début du film que « longtemps, je me suis accommodé de la réalité ». C’est sa raison d’être. Le moment est venu où l’on ne peut plus faire de concessions avec la réalité ; elle est trop complexe et trop grave pour la tamiser. Elle est sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Nos concitoyens du monde entier n’en ont pas vraiment conscience. Or tout se joue en ce moment. »

La philosophie du désespoir

« Je n’avais jamais pensé que mon combat devrait être aussi intense. Et, oui, je passe par des phases de désespoir parce que certains de mes interlocuteurs ne consentent à agir que pour me faire plaisir. Alors qu’on se situe sur un enjeu d’intérêt universel. Je vois bien l’inertie dans laquelle nous sommes. Le positivisme hérité du XIXe siècle est encore excessivement efficace. Mais je vois parallèlement que le génie humain ne fait jamais défaut quand on a besoin de lui.

« Nous avons remis dans le commentaire la fameuse phrase d’Einstein qui dit que « notre époque se caractérise par la profusion des moyens et la confusion des intentions ». Nos actions ont échappé à nos intentions. Nous avons une opportunité à un coup, c’est en l’espace de quelques années que ça va se jouer, pour redéfinir l’ambition du projet humain. »

Préserver pour partager

« Il y a deux priorités : préserver nos ressources au sens large du terme, et partager. La première conditionne la seconde. Quand on est dans la pénurie, quand l’essentiel vient à manquer, ce qui nous pend au nez pour beaucoup de choses, les valeurs liées à la démocratie ne résistent pas longtemps.

« C’est un appel à la mobilisation, un appel à l’action. Il faut que les citoyens valident, accompagnent, voire inventent un nouveau modèle. Même si on ne s’occupe pas de l’état de notre planète, il va se passer quelque chose. Sans notre consentement, la nature va procéder à des ajustements et ce sera excessivement violent. Je rappelle qu’il y a d’ores et déjà 300 000 morts par an dans le monde du fait des changements climatiques. »

La poudrière des inégalités

« Oui, je suis inquiet, parce que je n’ai pas simplement une vision livresque des événements. Pour ce qui concerne l’état de la nature, je fais partie de ceux qui ont pu voir l’accélération des phénomènes de manière très concrète. Depuis le temps que je voyage, j’ai aussi vu les inégalités se creuser. Elles deviennent d’autant plus obscènes que dans les endroits les plus reculés, il y a toujours une fenêtre sur le monde, qu’il s’agisse de la télévision ou d’Internet. Et les gens là-bas savent que, tout près, de l’autre côté du mur, d’autres se vautrent dans l’opulence et le gâchis. Ça crée des points de tension énormes, des frustrations et des humiliations. Où que j’aille, ce fossé nord-sud n’a jamais été aussi marqué.

« Il va bien falloir éliminer les gâchis et les excès, y compris dans Lire la suite