Pour sauver la planète les petits gestes ne suffisent pas

eco.rue89.com, 8 janvier 2009, Hélène Crié-Wiesner

Pour sauver la planète les petits gestes ne suffisent pas

Sortir du capitalisme pour sauver la planète, c’est dans l’air des deux côtés de l’Atlantique. Mais là où les Américains prennent des précautions de sioux pour ne pas être accusés de communisme, les Français n’ont pas ces pudeurs: ils osent volontiers les mots « utopie », « coopérative » et autres « rapports de classe ».

Deux auteurs, l’un français, l’autre états-unien, représentent ce courant qui a pris une ampleur inattendue avec l’emballement de la crise actuelle. Tous deux théorisent les fondations du nouveau monde nécessaire, qui ferait presque totalement table rase de l’actuel. Encore que l’Américain soit un peu moins radical, question de contexte historique sans doute.

James Gustav Speth, doyen à l’université Yale de la School of Forestry and Environmental Studies, a publié en 2008 « The Bridge at The Edge of The World: capitalism, the environment, and crossing from crisis to sustainability ». Traduction approximative: « Le Pont du bout du monde: le capitalisme, l’environnement, et le passage de la crise vers la durabilité. »

Gus Speth y pose notamment la question suivante:

« Comment expliquer ce paradoxe ? La communauté de ceux qui se soucient de l’environnement -à laquelle j’ai appartenu toute ma vie- ne cesse de grandir, de se sophistiquer et d’accroître son influence, elle lève des fonds considérables, et pourtant, les choses vont de pire en pire. »

« Pour sauver la planète, il faut sortir du capitalisme« 

Hervé Kempf, dont j’ai déjà évoqué l’ouvrage « Comment les riches détruisent la planète » (2007), publie cette semaine une suite à ce premier opus déjà traduit en quatre langues « Pour sauver la planète, sortez du capitalisme ».

Kempf y reprend des éléments de sa démonstration initiale, et expose sa méthode, analogue à celle de son confrère américain, mais en tournant moins autour du pot:

« Pour sauver la planète, il faut sortir du capitalisme, en reconstruisant une société où l’économie n’est pas reine mais outil, où la coopération l’emporte sur la compétition, où le bien commun prévaut sur le profit. »

Dit comme ça, c’est presque bateau, mais le livre de Kempf, court et facile à lire, est un concentré d’efficacité démonstrative. Il n’assomme pas le lecteur avec le détail de la catastrophe écologique mondiale en cours, celle-ci étant censée lui être déjà plus ou moins connue. Kempf rappelle les origines de la dérive qui nous a entraînés dans ce pétrin:

« Dans ‘Comment les riches détruisent la planète’, j’ai décrit la crise écologique et montré son articulation avec la situation sociale actuelle, marquée par une extrême inégalité. (…) J’ai résumé l’analyse du grand économiste Thorstein Veblen. Pour celui-ci, l’économie des sociétés humaines est dominée par un ressort, ‘la tendance à rivaliser -à se comparer à autrui pour le rabaisser’.

Le but essentiel de la richesse n’est pas de répondre à un besoin matériel, mais d’assurer une ‘distinction provocante’, autrement dit d’exhiber les signes d’un statut supérieur à celui de ses congénères. (…) Cela nourrit une consommation ostentatoire et un gaspillage généralisé. »

A l’origine de la catastrophe écologique, des dérives individualistes Lire la suite