La société d’horticulture de Bordeaux-Caudéran, écolo depuis 110 ans

sudouest.com, Denis Lherm, le 14 Octobre 2009

PATRIMOINE. Installée en pleine ville, la vieille société savante dispense un enseignement de grande qualité, à titre bénévole, dans un écrin de verdure totalement méconnu

La société d’horticulture de Caudéran, écolo depuis 110 ans

On peut difficilement trouver une centenaire plus verte que la société d’horticulture de Caudéran. Créé le 1er août 1899, cela fait plus de 110 ans que ce témoin de l’idéologie scientiste du XIXe siècle tient le pavé à Caudéran. Née avant la loi sur les associations, bâtie sur le modèle des vieilles sociétés savantes, elle voue un culte au savoir et à la connaissance des arbres fruitiers et des fleurs. Rue de l’église, coincée entre une résidence des années 70 et Saint-Amand, la société d’horticulture résiste au temps.

Dans les années 60, Chaban l’avait sauvée une première fois. Un sombre projet visait à transformer le terrain de la société horticole en lieu d’hébergement pour les jardiniers municipaux. Chaban avait réglé l’affaire en quelques secondes, comme toujours : « Si la société d’horticulture n’est pas d’accord pour partir, pourquoi la fait-on partir ? Elle reste là, c’est tout ».

285 arbres, 110 variétés

Quarante ans après, elle est toujours là, bien qu’un peu en décalage avec son époque. La plupart des habitants de Caudéran, et à plus forte raison ceux de Bordeaux, ignorent ce qui se passe derrière les grilles du 23, rue de l’Église, sous le regard fier du buste de Frantz Malvezin, créateur du jardin école, en 1905. Ici s’épanouissent 285 arbres de 110 variétés différentes, parfaitement palissés. Les membres de la société entretiennent bénévolement cet écrin à l’allure surannée. Ici surtout, la Société d’horticulture, d’arboriculture et de viticulture de Caudéran, c’est son nom exact, dispense un enseignement comme autrefois : long, complet, contraignant et de très grande qualité. Les élèves, pardon les sociétaires, sont environ 80 par promotion. Le programme des cours mobilise tous leurs samedis, et parfois leurs dimanches, de septembre à juin. Il est digne d’une académie d’horticulture. Quand les « élèves » sortent de là, ils sont costauds sur le sujet.

« Cette société est une chose étonnante, mais surtout un bien très précieux. On ne la lâchera jamais », lance Philippe Richard, directeur des jardins botaniques de la ville (jardin public et Bastide), qui y fit un passage comme enseignant. Il ajoute : « Ils ont une connaissance de l’arbre et de la taille incomparable, il n’y a qu’eux qui savent le faire et il n’y a plus un professeur d’horticulture qui sait le faire aussi bien. Dans les années 70, on avait arrêté d’enseigner la taille, car elle avait été remplacée par des pulvérisations hormonales. À Caudéran, ils ont continué sur la taille et ils sont restés les seuls à la connaître vraiment ».

La tradition

Parmi les sociétaires, il n’est pas rare de tomber sur un élève du lycée horticole de Blanquefort qui vient renforcer ses connaissances. La société est présidée depuis plus de 25 ans par Lucien Amsalem, qui en est membre depuis plus de 40 ans.

Quant à son vice-président, il se nomme Jean-Bernard Sarramia, c’est un descendant d’Émile Barbot, l’un des fondateurs de la société en 1899. On cultive donc ici les plantes mais aussi une forme de tradition.

« On est ici en famille, explique ce dernier. Au XIXe siècle, il y avait un marché de maraîchers à la place de l’église. C’est ce qui avait donné au maire l’idée de créer une société horticole. Au départ, c’était simplement démonstratif. Puis c’est devenu plus pédagogique. Un jardinier de la mairie venait donner des cours pratiques, pour vulgariser les connaissances. Mais le grand virage, c’est dans les années 1930, lorsque Lire la suite